Déploiement de troupes à la frontière sino-indienne

Le 18 Juillet, un article paru dans la presse indienne « The Hindu » nous apprend que l’armée indienne continue de renforcer son déploiement à la frontière avec la Chine, dans la région Est de Ladakh.

Des bunkers, des chars et des nouvelles troupes se masse dans cette zone à plus de 4 500m d’altitude, grâce au nouveau réseau routier que l’Inde s’efforce de construire le long de sa frontière Nord.

La région tranditionnelle de Ladakh, en rouge. (c Wikimedia)

La région tranditionnelle de Ladakh, en rouge. (c Wikimedia)

L’article n’a donné aucun détail sur la quantité de troupes ni la localisation exacte du déploiement, mais nous lisons entre les lignes que c’est proche de Leh, situé dans une vallée du Cachemire contrôlée par l’Inde.

Malgré ces efforts, les officiers indiens parlent d’un rattrappage du retard par rapport aux Chinois, qui ont très largement amélioré leurs infrastructures routières, ferroviaires et aériennes depuis les années 90′.

« Il n’y a pas d’accumulation (des forces armées) côté chinois, mais leur capacités logistiques continuent à augmenter. » rajoutent-ils.

Un jour après la publication de cet article, des détails supplémentaires sur le déploiement des troupes indiennes ont été révélés par la chaîne de télévision NDTV.

On voit dans la vidéo diffusée par la chaîne indienne des chars T-72M1 en manœuvre à quelques kilomètres seulement de la frontière sino-indienne. Le texte qui accompagne la vidéo parle de « près de 100 chars ».

Un officier sénior de l’armée indienne, qui a souhaité rester dans l’anonymat, indique que des blindés supplémentaires vont arriver sous peu.

Même si le lieu exact du campement des chars indiens n’a pas été révélé pour des raisons de confidentialité, mais nous pouvons tout de même identifier quelques endroits qui correspondent aux indications données dans ces deux publications, à savoir :

  1. « plus de 15 000 pieds (4 572m) d’altitude »
  2. « vallée plate »
  3. « à quelques kilomètres de la frontière avec la Chine »
  4. « sous le commandement de Leh »

Une recherche rapide dans Google Earth permet de localiser au moins deux endroits qui correspondent aux critères – Il s’agit de Daulat Beg Oldi (DBO) où un C-130J de l’armée de l’air indienne y avait posé avec succès en 2013, et de Fukche qui se situe dans le Sud-Est de Leh.

Les localisations possibles du campement des chars T-72M1

Les localisations possibles du campement des chars T-72M1

La Chine privilégie la mobilité, la précision et le soutien logistique

Côté chinois, il n’y a pas eu de réaction diplomatique ou de déclaration officielle pour le moment. Mais nous pouvons quant même avoir quelques idées en analysant les actualités récentes autour de la région militaire de Tibet.

Par exemple, l’agence de presse Xinhua a publié un texte le 28 Juin sur l’entraînement des soldats d’une brigade d’infanterie blindée de la région militaire de Tibet, à 4 800m d’altitude:

Le 5 Juillet, le journal officiel de l’armée chinoise publie un article sur l’intégration civilo-militaire dans le domaine du soutien logistique des troupes basées au Tibet.

On apprend par exemple que les unités de blindé lourd s’entraînent de plus en plus souvent sur le plateau de Tibet. Et au lieu de construire une station militaire de ravitaillement en fuel tous les 200km, l’armée chinoise a décidé de s’appuyer sur les stations de service civiles déjà implantées à chaque comté.

La recherche et développement de repas spécifique et des médicaments pour lutter contre l’hypoxie des troupes est réalisée désormais, pour le plupart, par les organisations locales, qui ont de longue expérience dans le domaine.

AU niveau des exercices récents, les journalistes militaires de l’armée ont publié récemment sur leur blog une série de photos d’un exercice de tir, mené par un régiment d’artillerie du Tibet, qui a eu lieu le 12 Juillet.

Des camions équipés d’un système d’artillerie de type PLC-09, similaire au canon français Caesar, ont été utilisés :

Toujours dans l’artillerie, la télévision nationale CCTV a diffusé hier un reportage sur un exercice de tir d’un régiment LRM de la région militaire de Tibet.

Les LRMS de type PHL-03 ont fait feu sur les cibles d’un CEP de 30m qui se situent à plus de 100km. Les unités ont mis 18 minutes du déploiement jusqu’au lancement des roquettes.

Pour finir, les NOTAMs indiquent également que l’armée de l’air chinoise mène régulièrement des exercices autour de la base aérienne Hotan. Celui le plus récent date d’aujourd’hui, où une zone de 250km de diamètre est fermée sous 9 800m d’altitude durant 13 heures. On retrouve des J-10 et parfois des J-11 dans cette base aérienne chinoise.

250 à 300km autour de la base aérienne de Hotan, et les positions stratégiques indiennes.

250 à 300km autour de la base aérienne de Hotan, et les positions stratégiques indiennes.

Nous sommes donc dans une situation de montée en puissance progressive des deux pays sur cette partie de frontière. L’Inde tente de rattraper son retard en infrastructure et se réconforte avec une supériorité numérique, tandis que la Chine semble privilégier l’efficacité et la mobilité.

Ces choix de l’un et de l’autre dépendent bien évidemment de la situation géographique un peu différente des deux côtés, mais aussi de la vision et des moyens d’investissement sur du moyen-long terme qui sont tout aussi différents.

En somme, des incidents ponctuels peuvent avoir lieu, et ils ont eu lieu, mais nous ne sommes clairement pas dans un scénario de conflit ouvert. Chacun prend et renforce ses positions, jusqu’à un certain moment opportun qui se présentera peut-être un jour, pour l’un comme pour l’autre…

Henri K.

 

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Et si la vision du monde est "biphasée" ? C'est ce que Henri a toujours cru, c'est également comme cela qu'il voit la Chine. Maladroit dans son écriture, souvent perdu dans ses pensées, ce responsable technique en aéronautique essaie pourtant de partager avec vous chaque jour les actualités sur l'Empire du Milieu, avec notamment les éléments à la source que vous ne verrez probablement jamais ailleurs en France.

Latest comments
  • Bonjour Henri K.
    Donglam ou Doklam a peut-être laissé des traces par rapport à la situation actuelle entre l’Inde et la Chine mais le problème remonte peut-être bien plus loin, bien avant la guerre sino-indienne de 1962. Il parait que PLA mène déjà une « guerre algorithmique » contre l’Inde. D’un coté, l’Inde ne semble pas disposer d’option militaire contre la Chine. D’un autre coté, l’Indian Army se dit être prête à affronter simultanément PLA et Pakistan Army…
    Merci pour ce blog.
    SAM.

  • « Si lA CHINE POPULAIRE et l’inde rentraient en guerre pour s’anéantir – pas tout à fait complètement », cela arrangerait pas mal de monde, NON?

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