Type 051B : Quand le destroyer « Shenzhen » se rend à Shenzhen

Le destroyer chinois 167 Shenzhen, l’unique navire de classe Type 051B, s’est rendu la semaine dernière à la ville de Shenzhen pour une escale de quatre jours, durant lesquels le bâtiment de 6 600 tonnes a profité pour ouvrir ses portes aux visiteurs.

L’événement est d’autant plus intéressant quand on sait que c’est la première fois depuis ses longs travaux de rénovation, qui ont eu lieu entre 2015 et 2017, que Shenzhen est ouvert au public. De nombreux amateurs et passionnés ont donc pu échanger de vive voix avec les officiers à bord lors de leur visites, ce qui nous a aussi permis d’apprendre quelques nouveautés de plus sur le « nouveau » Type 051B.

 

YJ-12A, le nouveau mais (très) cher fer de lance de Shenzhen

Si l’on établit une liste des armements les plus marquants qui ont été installés sur le destroyer Shenzhen récemment, du moins ceux qui sont visibles de l’extérieur, les missiles anti-navires supersoniques YJ-12A sortent sans doute haut la main.

Variante Mer-Mer du nouveau YJ-12 qui ne peut qu’être lancé depuis des bombardiers lourds de la marine chinoise jusqu’à présent, ce YJ-12A fait partie d’une nouvelle génération de vecteur anti-navire chinois avec la famille YJ-18, qui elle se décline en version Soum-Mer, Mer-Mer, Soum-Sol et Mer-Sol.

Mais l’un comme l’autre reste toujours dans l’ombre aujourd’hui et aucun détail technique n’a été révélé, du moins pas officiellement. On peut uniquement extrapoler la performance du YJ-12A à travers sa version d’export, le CM-302, qui a des caractéristiques dégradées en comparaison. D’après les brochures du concepteur CASIC, le CM-302 est doté d’une charge explosive de plus de 250 kg et a une portée de 290 km, le régime MTCR dont la Chine est l’un des pays signataires oblige, et ce avec une probabilité de 90% de toucher sa cible avec un seul missile.

Il va sans dire que nombreux sont des amateurs qui ont cherché à en savoir plus sur le YJ-12A lors des journées portes ouvertes, et à vrai dire ils n’ont pas été déçus. On apprend d’abord du panneau de présentation que le missile est conçu principalement pour frapper des « navires de grande et moyenne taille, ainsi que les porte-avions et les flottes », et le destroyer Shenzhen est le premier navire de la marine chinoise à en être équipé. Le texte met aussi en avant ses « multiples méthodes de pénétration » et sa « grande vitesse de croisière »

Quant à la portée du missile, le chiffre donné oralement par l’un des officiers chinois sur place est de « 400 km », pendant que d’autres ont souligné le prix très élevé et aussi la très grande précision (?) du missile, ce qui expliquerait pourquoi un seul YJ-12 sera tiré pour chaque cible, contre deux avec des missiles de l’ancienne génération.

En ce qui concerne la puissance du missile, et toujours selon un officier à bord, « Si un navire du même tonnage que Shenzhen est touché par un (YJ-12A), il sera brisé en deux et on peut abandonner immédiatement le navire, il n’y aura rien à faire ».

D’autres questions ont également été posées, comme pourquoi le navire s’est plutôt doté du YJ-12A au lieu du YJ-18A, ou encore pourquoi le YJ-12A n’a pas été intégré dans le système au lancement vertical… Et pour cela la réponse a été simple et unique : « Il n’y a pas assez de place ».

Pour l’anecdote, les caisses de lancement de YJ-12A ont été vidées pour cet événement, si l’on croit au commissaire politique du destroyer chinois.

 

Pas de moyens de lutte anti-sous-marine supplémentaire ?

A part les missiles anti-navires YJ-12A, l’autre changement majeur apporté par les travaux MLU au destroyer Shenzhen est la dotation d’un système au lancement vertical de 32 cellules, le même que se trouve sur les 30 frégates ASM chinoises Type 054A.

Si les officiers du destroyer chinois ont refusé d’indiquer, probablement pour des questions de confidentialité, le modèle exact du missile anti-aérien embarqué pour savoir s’il s’agit de l’ancien HQ-16 ou du nouveau HQ-16C à tête chercheuse Dual Mode, on apprend tout de même que l’interface de contrôle de missile anti-sous-marin n’a pas été installé dans le système VLS de Shenzhen, contrairement à toutes les frégates Type 054A.

Il en résulte que ce destroyer rétrofité ne peut pas lancer de torpilles Yu-8 depuis ses cellules verticales, et le commissaire politique du bâtiment, répondant aux questions des visiteurs, a également souligné qu’il n’y avait ni le budget ni l’emplacement nécessaire pour installer des sonars remorqués à la poupe du navire.

Doté désormais uniquement de lanceurs tri-tubes de torpille légère et probablement toujours le sonar de coque, le rôle du destroyer Shenzhen qui venait de faire peau neuve semble être orienté vers le contrôle de la mer comme avant, mais avec une capacité anti-sous-marine limitée et plutôt défensive maintenant, ce qui n’est pas un problème en soi à l’échelle de la flotte, sachant que les vecteurs de lutte anti-sous-marine au sein des forces navales chinoises sont en train de croître de manière rapide, aussi bien en nombre qu’en qualité.

Henri K.

 

¹ Merci à lilicook, bugshadow et 小鹹子-翻生 pour les photos utilisées ici.

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Et si la vision du monde est "biphasée" ? C'est ce que Henri a toujours cru, c'est également comme cela qu'il voit la Chine. Maladroit dans son écriture, souvent perdu dans ses pensées, ce responsable technique en aéronautique essaie pourtant de partager avec vous chaque jour les actualités sur l'Empire du Milieu, avec notamment les éléments à la source que vous ne verrez probablement jamais ailleurs en France.

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