L’un des plus grands constructeurs des fusées spatiales en Chine, CALT (China Academy of Launch Vehicle Technology), qui conçoit une bonne partie des lanceurs de la famille Longue Marche, a révélé plusieurs de ses projets de lanceur réutilisable lors de la conférence internationale GLEX 2017.
Selon la présentation de cette filiale du groupe d’aérospatiale chinois CASC, des technologies pour récupérer et réutiliser la (première ?) étage de lanceur sont en train d’être étudiées. Cela comprend notamment l’atterrissage en parachute et celui de manière propulsée, dont certaines développements clés ont été achevés.
Bien qu’aucun détail n’a été donné cette fois-ci, mais le lanceur à pieds déployable que l’on peut voir sur la présentation semble être évolué depuis un projet connu depuis l’an dernier.
En effet, lors du congrès international d’astronautique 2016 qui s’est tenu à Guadalajara, en Mexique, WANG Xiao Wei, chercheur de l’Institut CALT, a déjà présenté deux projets de « petit » lanceur réutilisable en cours d’études. Ces lanceurs partiellement réutilisables s’adressent principalement aux besoins de lancement des satellites pesant moins d’une tonne en orbite héliosynchrone (SSO).
Le positionnement de ces lanceurs réutilisables chinois dans le marché semble donc être très différent de celui de Falcon 9 de SpaceX. Cela semble suggérer aussi que pour les nouveaux lanceurs chinois de plus grande taille, comme le CZ-7 (LEO 13,5t) et le CZ-5 (GTO 13t, LEO 23t), la fréquence de tirs ne justifierait pas l’application du concept de réutilisation.
D’après les publications d’IAC 2016, les ingénieurs de CALT ont évalué jusqu’à présent trois méthodes différentes pour récupérer les étages d’une fusée, dont les deux déjà évoquées précédemment, plus celle qui consiste à faire atterrir à l’horizontal les parties réutilisables, comme ce que prévoit Airbus Defence & Space dans son projet Adeline (« ADvanced Expendable Launcher with INnovative engine Economy »).
L’étude chinoise se base principalement sur 4 critères qui impactent directement sur la performance économique d’un lanceur réutilisable, à savoir la difficulté technologique, la répercussion sur la conception des systèmes embarqués traditionnels, la perte en capacité d’emport utile, et la difficulté à retrouver les parties récupérées après l’atterrissage de celles-ci.
Sur la perte en capacité d’emport du lanceur par exemple, CALT estime qu’il y aurait une perte de moins de 10% en capacité si la récupération se fait par parachutage non contrôlé (qui ne retourne donc pas au site du lancement et nécessite une opération de recherche et de récupération au sol).
Ce chiffre monterait à plus de 30% pour un parachutage contrôlé, 40% pour un atterrissage propulsé à la verticale comme Falcon 9, voir jusqu’à 70% lorsqu’il s’agit de mission de transfert géostationnaire.
Quant à la méthode du retour horizontal, la perte en capacité serait toujours plus importante que les deux premières méthodes d’après leurs estimations, ce qui expliquerait pourquoi CALT n’a pas évoqué cette voie lors de sa présentation à GLEX cette année.
Et si les Chinois semblent avoir pris du retard dans le domaine par rapport à leurs homologues américains et européens, le nombre de publications R&D en matière de lanceur réutilisable montre que la Chine s’est en fait très tôt intéressée par le potentiel économique du concept de réutilisation partielle ou totale des fusées.
Sur les 426 publications rendues public depuis 1989 (recensement non exhaustif), CALT arrive justement en tête avec 53 documents et brevets – essentiellement portés sur l’évaluation du coût lié au cycle de vie d’un lanceur réutilisable, la conception des trajectoires, les matériaux, la propulsion ainsi que les méthodes de l’automatisation d’inspection post-récupération – suivi par l’Université NUDT de l’armée chinoise (22) et l’Université Polytechnique du Nord-Ouest (18).
Les chiffres montrent d’ailleurs que plusieurs bureaux d’études chinois en propulsion spatiale se sont aussi lancés dans la recherche de moteur réutilisable.
Par exemple, l’Académie n°6 du groupe CASC, spécialisée dans la conception des moteurs à ergol liquide, a déjà exposé un moteur LOX / Méthane au dernier Salon aéronautique de Zhuhai. Le premier test de ce moteur, réutilisable 50 fois et conçu spécifiquement pour ce type de lanceur réutilisable, s’est terminé avec succès en 2013.
Quant aux essais dont parlait CALT, on sait que leurs équipes ont déjà réalisé plusieurs tests de récupération par parachute, dont un qui a eu lieu en fin Novembre 2015 où une maquette réduite de première étage d’un lanceur a été employée.
Hormis le lanceur réutilisable, les industriels chinois s’attaquent aussi à un autre type de vecteur d’avenir pour l’accès à l’espace. Tout comme son rival CASIC, qui se lance dans le développement d’un avion spatial à deux étages appelé « Teng Yun », CASC prévoit également de réaliser progressivement un engin équivalent.
La première étape pour la maison mère de CALT consiste à construire une navette propulsée par une fusée, donc partiellement récupérable, suivie par un engin porteur réutilisable plus la navette, pour finir sur un engin de propulsion combinée entièrement réutilisable, mais aucun calendrier précis n’a été donné.
Henri K.
Meiyo | 2017-06-10
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Sympa l’illustration avec un étage du jeu Kerbal Space Program 🙂
Henri KENHMANN | Author | 2017-06-11
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Il n’y a pas encore d’images assez nettes pour voir les fusées en question alors j’ai volontairement choisi une image « fictive ». 🙂
Henri